Pieros

Les infections de l'aorte abdominale primaire et secondaire sont des pathologies rares (incidence 0,6-2 %), avec un taux de mortalité élevé (20 à 40 %). Leur prise en charge chirurgicale par voie ouverte présente un risque majeur de morbi-mortalité postopératoire et nécessite d'être pluridisciplinaire et standardisée. Les connaissances sur la gestion périopératoire de ces chirurgies, et plus particulièrement sur le plan anesthésique, restent peu approfondies et basées sur une littérature limitée, en quantité et qualité. Décrire rétrospectivement la prise en charge périopératoire et l'incidence des complications postopératoires des chirurgies de l'aorte abdominale infectée et rechercher des facteurs pré et peropératoires, si possible modifiables et indépendants, associés à la survenue de complications postopératoires majeures. Ce travail de recherche est une étude observationnelle de cohorte rétrospective monocentrique. Nous avons inclus tous les patients pris en charge pour une infection aortique abdominale (primaire ou secondaire) de manière chirurgicale ouverte conventionnelle, dans le Centre de référence des infections vasculaires complexes (CRIVasC) à l'hôpital Édouard Herriot des Hospices Civils de Lyon (HCL), de juin 2015 à juin 2021. Pour chaque patient, nous avons réalisé un recueil exhaustif des données pré, per et postopératoires. Le critère de jugement principal (CJP) de notre étude était un critère composite, regroupant quatre complications majeures postopératoires (rénales, cardiaques, chirurgicales, neurologiques). Les différents critères de jugement secondaires (CJS) étaient les facteurs associés à la mortalité en réanimation, la durée d'hospitalisation en réanimation et la durée de ventilation mécanique. Nous avons réalisé des analyses statistiques univariées sur le CJP et les CJS, et multivariées sur le CJP en incluant les variables significatives en univariée. Notre analyse s'est basée sur trente patients dont douze ont présenté le CJP. Nous avons mis en évidence que la présence d'une fistule aorto-digestive ainsi que la durée de la chirurgie sont significativement associées à la survenue de complications postopératoires majeures en analyse univariée. Ces critères étaient néanmoins non significatifs lors de l'analyse multivariée. De plus, les doses maximales de noradrénaline en peropératoire, les doses de noradrénaline en fin d'intervention, le pH ainsi que le lactate sur le bilan post-déclampage sont également associés à la survenue de complications postopératoires majeures. Ces différents facteurs pourront être utilisés comme une aide au pronostic, et seront des critères d'alerte du risque de complications postopératoires. Les chirurgies de l'aorte abdominale infectée (primaire ou secondaire) présentent un taux très élevé de complications postopératoires (notamment rénales) et nécessitent donc une prise en charge dans un centre expert. La littérature concernant les facteurs prédictifs de complications postopératoires est quasi exclusivement basée sur des petites séries rétrospectives monocentriques. Notre travail a mis en évidence la fistule aorto-digestive ainsi que la durée de la chirurgie comme facteurs associés à la survenue de complications postopératoires. Des études de cohortes prospectives nationales, voire internationales, pourraient être envisagées pour approfondir les connaissances sur le sujet.